Le 9 septembre, c’est la première « Livraison de clowns à domicile », un projet innovant construit en partenariat avec le Service de Soins Infirmiers à Domicile de Anse.
Deux artistes-clowns accompagnés d’une soignante se rendent chaque semaine au domicile de trois personnes âgées atteintes de troubles cognitifs et/ou en situation d’isolement. Pour les clowns et les comédiens qui se cachent derrière le nez, l’enjeu de ce projet est de faire entrer de la vie de l’extérieur chez ces personnes et de leur redonner le goût de la relation. Cela passe d’abord par la rencontre, puis la construction au fil du temps d’une histoire commune.
Si la rencontre est un objectif toujours présent chez les artistes dans les services de soins, l’approche est ici différente de celle de l’hôpital. Le domicile soulève d’une part la question de la sphère privée et, d’autre part, la question de la solitude sociale qui peut toucher certaines des personnes visitées.
Le logement est en effet le lieu de la sécurité, de l’intimité, de la liberté de montrer ou pas, d’ouvrir ou non sa porte, c’est le lieu où l’on est maître chez soi. C’est un endroit qui ne se donne pas naturellement à voir parce qu’il parle de soi, de son intérieur. Comment alors entrer sans être intrusif, sans trop envahir, tout en apportant de la vie de l’extérieur ?
Jonglant entre l’enthousiasme et la spontanéité du clown et le respect du temps nécessaire à la connaissance réciproque, Zoé et Pirgo se sont lancés dans cette nouvelle aventure, accompagnés par Alice et Alice, aide-soignante et stagiaire-infirmière.
Madame R., chez qui les clowns se rendent tout d’abord, est curieuse de les découvrir. Durant une heure, depuis son lit, elle chante, discute avec eux et profite de la sérénade que lui donne Pirgo sous sa fenêtre. Un bel échange pour une première rencontre !
Madame V., elle, n’a pas envie de voir les clowns et leur exprime clairement : « Je suis toute seule toute la journée, là c’est beaucoup trop pour moi ! ». Face à une sociabilité restreinte, la venue des artistes peut être vécue comme un « raz de marée » venu du monde extérieur. Zoé et Pirgo ont beau se faire tout petits, c’est encore trop ! Ils parviennent malgré tout à accompagner Madame V. à distance dans la rue en jouant de la musique tout doucement. Puis ils la quittent sur une promesse de retour, « à la prochaine fois ! », à laquelle Madame V. répond : « Pas trop souvent quand même ! ». La fois suivante, elle accepte de les saluer par la fenêtre et les écoute lui chanter « Je suis venu te dire que je m’en vais ». De tout petits pas que les clowns vont essayer de renouveler, pour tenter de tisser un lien au fil des semaines.
La dernière visite commence aussi par un mouvement de refus. Madame G. se dit gênée par les masques des clowns qui l’empêchent de les voir et de les entendre. Pirgo n’hésite pas alors à sortir pour réapparaître non-masqué derrière la vitre de la fenêtre. Charmée par cette apparition, Madame G. raconte son ancienne vie lorsqu’elle était professeure, et donne aux clowns une leçon d’histoire et de géographie.
Ces trois visites ont été riches en découvertes et en rencontres. Elles ont soulevé des questionnements qui vont venir alimenter le jeu des clowns. Ainsi, après s’être posé la question « que peut-on apporter à nos hôtes en échange de leur accueil ? », les clowns ont décidé de devenir « livreurs d’envies » et d’inviter chaque personne rencontrée à choisir sur une liste son envie du jour qu’ils se chargeront de réaliser. Le choix est vaste : du jardinage, une scène historique, une balade en Harley, un combat de boxe, du repassage… Un joli prétexte pour retrouver le plaisir de jouer !
« On est parti en décapotable. C’était serré mais agréable, même si Zoé m’a écrasé les matatarses. Je garde de ce voyage le souvenir de belles rencontres avec de charmantes dames qu’il nous a fallu un peu apprivoiser, parce qu’elles ont été un peu défrisées au départ. Zoé et Pirgo ça décoiffe ! »
Pirgo, comédien-clown
Ce projet est financé par le groupe APICIL.
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